A l’occasion de la parution de Tout sur Colette (ou presque), nouveau-né de la collection de miscellanées des éditions Cours toujours, la librairie Pages d’encre d’Amiens accueillait Samia Bordji, autrice de l’ouvrage et directrice du Musée Colette de Saint-Sauveur-en-Puisaye, village natale de l’écrivaine dans l’Yonne, et Dominique Brisson son éditrice le 7 mars 2024.
Grande figure féminine de la littérature, personnage romanesque aux nombreuses facettes, Colette est difficile à faire tenir dans un livre mais la forme de celui-ci lui sied bien. Offrant une déambulation parmi 167 sujets (textes, œuvres, portraits, photos, témoignages d’experts), il propose de la (re)découvrir à travers quatre parcours : • Des carrières multiples • Une œuvre inclassable • Une femme mise en scène • Le paradis perdu de l’enfance.
Passionnante à écouter, Samia Bordji connaît le « sujet Colette » sur le bout des doigts : « La vraie rencontre que j’ai eue avec elle, c’est une révolution intérieure. Pour moi le monde changeait tout à coup. J’avais l’impression de mieux sentir, de mieux voir. La Vagabonde (1910) reste l’un de mes romans préférés. C’est la vraie Colette. »
Choyée par ses parents qui lui laissent beaucoup de liberté, dévoreuse de livres comme tous les membres de la famille, Sidonie-Gabrielle Colette (1873-1954) passe les 18 premières années de sa vie à Saint-Sauveur. C’est le journaliste écrivain Henry Gauthier-Villers dit Willy, le premier de ses trois maris, « un des rois du Paris 1900 », qui révèle (et exploite) le talent d’écrivaine de la jeune femme.
Dans Claudine à l’école (1910) le premier de leurs romans qu’il signe seul, Colette règle ses comptes avec les villageois de son enfance mis en scène : « un jeu de massacres […] une exécution en règle. En donnant un tel tour à ses souvenirs, elle souhaitait venger l'humiliation que sa famille avait subie au moment de la ruine et du départ à l'automne 1891, événements que les villageois avaient commentés avec beaucoup de malveillance, voire de cruauté. » Le livre est un immense succès dont Willy saura tirer le filon. A lui aussi, Colette fera payer plus tard ses trahisons mais elle continue à signer ses livres « Colette Willy » jusqu’à la parution du Blé en herbe en 1923, elle a alors 50 ans.
« Tout au long de sa carrière, Colette ne cesse de le répéter : elle a horreur d’écrire ! […] Son style, en apparence si naturel, si spontané, est en réalité le fruit d’une conquête, d’un combat intérieur qu’elle livre contre elle-même. » L’écrivaine au caractère bien trempé, artiste de music-hall, sportive accomplie (gymnastique, équitation, vélo, nage, boxe…), amie des animaux, reporter, féministe sans étendard ni théorie, ne laisse personne indifférent. Le 7 août 1954, elle est la première femme à avoir droit à des funérailles nationales, suivies par 10 000 personnes. « Colette plus qu’un symbole, une icône ! »