"On a tant détruit depuis / le dernier jour au bord de la Spree : des villes, / des arbres, des peuples. S’il faut un bouquet / pour chaque victime, la Terre / sera rose, violette, camélia, / la Terre sera Rosa." Rose cendrée (Éranthis) de Jean-Louis Rambour (textes) et Pierre Tréfois (dessins).
Paru en juin 2021, le livre compte une trentaine de pages, quatorze dessins et autant de textes qui forment un long poème en mémoire de Rosa Luxemburg (1870-1919). Militante socialiste et théoricienne marxiste, pacifiste, cofondatrice de la Ligue spartakiste en Allemagne, Rosa est arrêtée le 15 janvier 1919 à Berlin, violentée et abattue par les Freikorps (corps-francs) qui jettent son cadavre dans le canal de la Spree.
La maison belge Éranthis réalise un beau travail d’édition avec cet ouvrage. Les dessins du peintre et poète Pierre Tréfois absorbent le regard. Ils disent les fleurs, le sang, le tourbillon de l’eau, et "la lumière qui rêve" selon l’expression de Julien Carré, auteur de la postface du livre, en quatrième de couverture.
Jean-Louis Rambour, qui s’y connaît en histoire, en mémoire et en deuil, offre à Rosa le tombeau (poétique) que ses bourreaux lui ont dénié. Ses mots, comme toujours, sonnent clair et touchent au cœur. Jean-Louis Rambour est un poète lucide mais sous sa plume tout n’est pas perdu, puisque des fleurs poussent dans la terre qui se nourrit, depuis que le monde est monde, du sang des justes et des révoltés. Il faut veiller à ne pas les oublier.