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« Je repense à ces livres achetés avec ma mère à Téhéran. À ceux dont certaines pages ont été déchirées. À force d'être censurés, ils ne font plus aucun sens. C'est ça aussi, le féminin. À force de l'effacer, la femme devient un non-sens. » Badjens (Seuil) de Delphine Minoui
Le roman commence le 24 octobre 2022 à Chiraz en Iran, lorsque le pays s’enflamme après la mort de Mahsa Amini. En plein mouvement « Femme, vie, liberté », une jeune fille de 16 ans escalade une benne à ordures sous le regard des miliciens. Acclamée par la foule, elle s’apprête à brûler son voile : « C’est pour Mahsa que t’es là. Parce que Masha, ça aurait pu être toi. Ou ta voisine. Ou ta meilleure amie. »
Retour en arrière. Zahra, l’adolescente en question, prend la parole et nous raconte sa vie. De sa naissance de fille, vécue par ses proches comme une tragédie, jusqu’à la rébellion en 2022. Une révolte déjà contenue, dans l’autre nom que lui a donné sa mère : « Bad-jens : mot à mot, mauvais genre. En persan de tous les jours : espiègle ou effrontée. »
Sous le maghnae qu’on l’oblige à porter dès l’âge de 9 ans, elle lutte pour ne pas disparaître. « Je me suis reprogrammée. Il y aura un dedans et un dehors. La vie imposée et la mienne. » Mais comment habiter un corps dont on vous refuse l’appartenance ? Comment aimer, danser, se toucher ? Quel avenir sous le régime des mollahs ? « À quoi bon étudier puisque tout est faux ? » Fenêtre ouverte sur l’extérieur, Internet l’aide à respirer. Son rêve ? Devenir tatoueuse professionnelle, et s’exprimer enfin.
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Pour l’écriture de ce roman, Delphine Minoui – grand reporter née en France de père iranien - s’est liée via les réseaux, à une dizaine de jeunes Iraniennes qui ont nourri son personnage. Badjens s’inspire de Nika Shakarami, arrêtée pendant une manifestation en 2022, agressée sexuellement puis battue à mort par des membres des forces de sécurité. Elle avait 16 ans. [Photos : Delphine Minoui, Festival Le Goût des autres au Havre 19.01.25, Nika Shakarami © Réseaux sociaux]