Bolaño, Macron et Désérable dans Lettre Zola n°14

« Monsieur le Président, j'ai dit, très heureux de vous retrouver à cette réunion de l'Amicale des anciens élèves de La Pro. On a fréquenté le même lycée, lui et moi. Pas au même moment - à dix années d'écart - mais le même lycée : celui de La Providence, à Amiens, que personne à Amiens n'appelle La Providence. On dit La Pro, tout simplement. Il a souri encore davantage, si c'était possible, et il a dit alors, est-ce que vous avez eu l'occasion de saluer votre ancienne prof ? »

Après Blandine Rinkel ou Arthur Dreyfus, c’est François-Henri Désérable qui signe un numéro de Lettre Zola, média littéraire initié par deux amis d’enfance : Louis Vendel et Manor Askenazi. « Une revue singulière, par abonnement et par voie postale, pour raconter la société française sous forme d'histoires vraies. » Lancé en 2024 sous le parrainage d’Éric Fottorino, avec le soutien d’une trentaine de jeunes auteurs primés, Lettre Zola se présente chaque mois sous la forme d’une élégante enveloppe conçue par le studio de design graphique Voiture 14, qui se déplie en un livre d’une cinquantaine de pages.

Dans le numéro 14, François-Henri Désérable nous emmène à Santiago du Chili où, en novembre 2024, il doit donner une conférence sur l’écrivain Roberto Bolaño. Une chambre lui est réservée à l’ambassade de France. Hasard ou destin, son séjour se déroule au moment de la visite d’Emmanuel Macron, comme lui originaire d’Amiens. L’écrivain est amené à le rencontrer dans les jardins de l’ambassade - « Chacun voulait l’approcher, être pris en photo avec lui. Le selfie présidentiel : la version républicaine et 2.0 du « Touchez ma bosse, monseigneur » - puis à dîner à sa table. On rit de bon cœur en lisant le récit de Désérable, coincé au milieu de « personnalités intellectuelles et culturelles » très occupées à faire leur cour. Sur l’exercice du pouvoir, son ironie fait mouche. On se demande pourquoi tant de gens (a priori) sains de corps et d’esprit, persistent encore à se l’arracher… et on regrette de n’avoir pas connu la grand-mère de l’auteur.