Mercredi 21 mars 2012, Franz-Olivier Giesbert était l'invité du groupe Sup de Co Amiens. Journaliste, il est aujourd'hui directeur du magazine Le Point, après avoir été celui de la rédaction du Nouvel Observateur, du Figaro et du Figaro magazine.
Il anime plusieurs émissions de télévision, actuellement sur France 5 et LCP. Enfin, FOG est biographe et romancier. Et c'est au sujet de son dernier roman paru au mois de janvier : Dieu, ma mère et moi (Ed. Gallimard), qu'il est venu s'exprimer à Amiens.
"Je n'ai jamais eu à chercher Dieu : je vis avec lui. Avant même que je sois extrait par des spatules du ventre de ma mère où je serais bien resté, si on m'avait demandé mon avis, il était en moi comme je suis en lui. Il m'accompagne tout le temps. Même quand je dors. C'est ma mère qui m'a inoculé Dieu."
À son arrivée, Franz-Olivier Giesbert donne immédiatement le ton : "je suis venu parler de Dieu". Mais il n'est pas venu en parler seul. A l'exercice solitaire de la conférence, il préfère résolument l'échange. Il choisit donc d'exposer brièvement les convictions évoquées dans son livre, un ouvrage écrit assez vite.
"Je suis né croyant. Mais j'ai changé de foi" dit-il. Car pour l'écrivain, la question n'est pas : "croire ou ne pas croire ?". Ce problème est résolu depuis toujours. Il est pénétré d'une fois joyeuse qui s'apparente au panthéisme : Dieu est tout. Il évoque à cet égard, le choc qu'il a reçu à la lecture de L'Éthique de Spinoza. Il s'est reconnu alors dans la conception Deus Ive Natura (Dieu ou la nature) du célèbre philosophe. Il est devenu végétarien.
Il se dit chrétien pourtant, de tradition du moins, puisqu'il affirme ne croire ni au Dieu créationniste, ni à l'Eucharistie, ni à la Vie éternelle. Il aime les églises pour leur beauté. Il a baigné dans la religion catholique auprès de sa mère, "une caricature de sainte mystique qu'un rien exaltait". Il en a gardé le sentiment que "la figure du Christ est absolument merveilleuse".
Il distingue cependant religion et sentiment religieux, et demeure convaincu que toutes les religions portent en elles des choses sublimes. "Pourquoi s'exclure ?" demande-t-il. Pourquoi choisir entre Bouddha, Zarathoustra et Sainte Thérèse de Lisieux ? L'humanité a besoin de transcendance selon lui. L'Histoire des religions et leur mise en perspective lui semble fondamentale. "On a toujours tort de faire des généralisations et de simplifier les choses".
Rapidement, les questions fusent dans la salle. Franz-Olivier Giesbert a instauré un climat convivial et le sujet ne laisse personne indifférent. Alors que le drame de Toulouse est dans tous les esprits - Mohammed Merah est encore retranché chez lui, assailli par les policiers du RAID - de nombreuses interventions du public portent sur l'Islam. Le journaliste rappelle que l'Islam est apparu au 6ème siècle et que si l'on considère que les religions ont une vie (naissance, âge adulte, mort) il n'en est qu'à son âge infantile et prosélyte. Il faut le mettre en perspective avec le christianisme du 15ème siècle.
Il ajoute que plusieurs Islam cohabitent aujourd'hui et que le salafisme (dont se réclamait Mohammed Merah) présente le visage le plus hideux de la religion, alors que le Coran recèle des textes d'une grande douceur. Il considère qu'il ne faut chercher aucune excuse au terrorisme djihadiste. "L'erreur serait une attitude de compréhension et d'écoute." Un garçon comme Mohammed Merah ne mérite aucune empathie, selon lui. Il a eu accès à l'école de la République, puis il a basculé dans la haine, mais la société n'a pas à se sentir responsable de ses déviances.
Concernant la place des religions dans notre société française, Franz-Olivier Giesbert clame son attachement à la Loi du 9 décembre 1905, concernant la séparation des Églises et de l'État. Républicain croyant et laïc, il est favorable à l'accueil et à la diversité, mais dans le respect des institutions. "Ce sont les religions qui doivent s'adapter aux lois et pas le contraire".
Il dénonce sans langue de bois des "pouvoirs faibles" et "un certain affaissement de la République" sur des questions telles que la viande halal ou les horaires aménagés pour les femmes, dans certaines piscines. La laïcité est une belle valeur qui mérite d'être défendue. "Le problème de la République, c'est qu'elle ne croit pas assez en elle." conclut-il.
Allergique à l'anthropocentrisme (doctrine selon laquelle l'Homme est le centre de l'univers), Franz-Olivier Giesbert est profondément croyant. Passionné par les religions, fasciné par la proximité des messages délivrés par certains prophètes sur des continents différents, il reste à la fois catholique et convaincu que "Dieu est une chose trop importante pour être confiée à une seule religion"...
"L'amour est la Joie accompagnée de l'idée d'une cause extérieure."
(L'Éthique, Livre III - Baruch Spinoza - 1677)
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