Les Chevals morts d'Antoine Mouton

"est-ce que tu entends cette tristesse qui essaie de nous désunir est-ce que tu entends derrière nous les chevals tous mourir ?" Les Chevals morts (La Contre Allée) d’Antoine Mouton.

Ce livre est un appel à la vigilance. Peut-être même, à la résistance ! S’adressant à un "tu" profondément aimé, le narrateur exprime son désir farouche de faire durer l’amour. Il observe, il voit autour de lui que beaucoup se séparent, "et toute la tristesse qui disloque les gens, toute cette tristesse qui accompagne les gens dont les chemins se sont séparés, ça fait comme une horde de chevals morts entre eux […] c’est une cataclop, une cataclop, une cataclop, une cataclop tous ces gens que les chevals morts de tristesse écartèlent". Et personne n’est à l’abri, "parfois l’écueil, l’écartèlement, la disjonction des chemins contraires à l’amour à la joie à la folie d’être ensemble / cataclop". Raison de plus, donc, pour être vigilants : "il suffit de bien regarder où nous mènent les chemins qu’on prend il suffit de rester clairvoyants".

Dans une langue extraordinairement libre et créative, Antoine Mouton refuse de jeter l’éponge. Sa poésie narrative, souvent teintée d’humour, sort le lecteur de sa zone de confort. La ponctuation est presque inexistante dans le texte qui cavale, les chevals morts à ses trousses. Page après page, il nous rappelle que "le seul bonheur c’est l’amour le reste n’est que suggestions de chevals morts", ces oiseaux de mauvais augure qui prédisent nos échecs. Et puisqu’ils se nourrissent de nos amours perdues, "nous répondrons aux chevals morts que nous savons extraire de la tristesse la joie la plus intense".

Déjà publié en 2013 aux éditions Les Effarées, Les Chevals morts a été réédité en mars 2022 aux éditions de La Contre Allée (Lille), qu’elles en soient remerciées ! Ne passez pas à côté de ce texte, frissons garantis. [Photo © Justine Arnal]